Guerre ou civilisation…

Texte : Andrea Zanin, Montréal

 

Suis-je la seule à trouver que la guerre n’a tout simplement pas de sens?

 Je ne peux pas affirmer être courant de toutes les réalités politiques actuelles de tous les pays du monde; je sais que plusieurs conflits sévissent dans le monde, mais je n’en comprends pas nécessairement le pourquoi ni le comment. De plus, je n’ai jamais été une mordue d’Histoire; les détails complexes de la bataille de ci ou de ça en 1812 se sont effacés de ma mémoire dès que j’ai remis l’examen au professeur en secondaire IV. Je voulais en apprendre sur la vie des gens et non sur leur mort.  

J’imagine que je ne suis pas la seule dans cette situation. Ici, au Canada, il fait bon vivre… nous sommes en sécurité et les conflits armés se passent assez loin pour qu’on ne se sente pas menacés, et, de toute façon, nous préférons les Simpsons à CNN. Je suis cependant « armée » de bon sens.

Je me souviens d’une bande dessinée de « For Better or for Worse » qui reflète bien une expérience que plusieurs d’entre nous ont sûrement déjà vécue. Little Mikey frappe sa soeur sur la tête pour une raison quelconque. Son père le prend, le retourne et lui donne une fessée en lui criant : « Ne frappe pas ta soeur! » Hmm… peut-on faire un parallèle entre cet exemple et les événements qui se déroulent dans le monde actuellement?

Voyons voir… si je comprends bien, le gouvernement américain, représenté par George W., fait tout en son pouvoir pour empêcher les femmes (surtout celles des autres pays) de se faire avorter, mais n’éprouve aucun remords à posséder et à déployer la plus importante et la plus coûteuse des armées. Encore plus lorsqu’il s’agit de faire sauter les amis et les familles de ceux qui ont fait sauter le WTC. Œil pour œil dent pour dent étant de toute évidence l’approche la plus efficace pour résoudre les conflits et pour empêcher d’autres 11 septembre. Selon les États-Unis, l’avortement ne devrait pas être permis (surtout dans les autres pays), mais tuer des gens alors qu’ils sont en vie et dans la force de l’âge, alors là, c’est beaucoup mieux…

 

Pablo Picasso : le visage de la guerre

Il y a aussi les Irlandais… ces derniers entretiennent depuis des générations un conflit armé fondé sur des divergences religieuses. « Tu ne tueras point » n’est-il pas un des dix commandements du christianisme? Chaque religion du monde adhère à ce principe, et il ne faut pas croire que ce sont uniquement des satanistes enragés qui contrôlent la plupart des guerres. Malgré tout, la religion a été, tout au long de l’Histoire, un des motifs les plus fréquents de conflit armé. Contradictoire, non?

On ne peut pas aborder le thème de la guerre sans mentionner l’holocauste. D’une côté, ce genre d’événement est si effroyable (et controversé) qu’on n’ose pas croire qu’il a pu exister réellement; de l’autre, il sert de thème aux superproductions des cinéastes hollywoodiens.

Évidemment, comme l’information présentée dans les médias est filtrée et forgée selon l’opinion personnelle de plusieurs personnes avant d’arriver jusqu’à nos téléviseurs et journaux, d’autres événements aussi horribles (peut-être à une échelle différente) sont probablement survenus sur notre planète, et ce, au cours de la dernière décennie, et nous n’en avons pas la moindre idée. (Noam Chomsky en a long à dire sur le sujet, si cela vous intéresse.)

Plus près de nous, l’an dernier dans la ville de Québec et ailleurs, la GRC arrêtait des activistes avant même qu’ils ne se mettent à manifester (vous ne saviez pas encore qu’être activiste signifie perdre ses droits?), et les policiers lançaient, par-dessus d’immenses clôtures, des gaz lacrymogènes en direction de 50 ou 60 manifestants par mesure de contrôle, alors que la foule (plusieurs milliers) marchait, plus loin, paisiblement, avec bannières et théâtre de rue… j’y étais et croyez-moi, c’était démesuré. Cette expérience est probablement celle que j’ai vécue qui se rapproche le plus de la guerre; à eux seuls, les gaz lacrymogènes m’ont convaincue encore plus que ce genre d’approche n’a aucun sens.

Quand nous voyons des scènes de guerre aux nouvelles, nous avons tendance à penser que la guerre, c’est pour les autres. Même si nous avons été touchés de plus près le 11 septembre 2001, les soldats ne marchaient pas dans les rues et les coups de fusil ne nous tenaient pas réveillés la nuit.

 Guerre égale mort… rien dans la vie n’est aussi fatal, aussi noir ou blanc et absolu que la mort. Nous pourrions parler de la vie après la mort, mais je ne pense pas qu’une personne qui a un revolver sur la tempe arrive à trouver cela rassurant.

 Si ce qui fait de nous des êtres humains et civilisés est notre capacité de raisonner et de penser, comment se fait-il que nos raisonnements puissent mener à la mort de quelqu’un?

Photo : Anick Perreault-Labelle

Et lorsque cette personne devient des centaines et des milliers de personnes… Comment peut-on trouver un sens, en tant qu’espèce, à l’extermination délibérée des nôtres? Si l’on pense à l’intelligence et à l’éducation que nous avons, comment se peut-il que les gens résolvent encore leurs problèmes de la manière la plus brutale qui soit? Est-ce dans la « nature humaine » ou est-ce simplement une porte de sortie facile, une façon de régler la question sans avoir vraiment à nous analyser et à trouver une meilleure façon?

 L’Américaine Ursula K. LeGuin, une écrivaine et romancière de science fiction a écrit : « La guerre et la civilisation sont deux réalités opposées. Des deux, on ne peut en vivre qu’une seule, pas les deux. »

 Je ne prétends pas comprendre la complexité de toutes les situations où la guerre fait partie du problème. Mais je persiste à croire que tuer des gens n’est pas la manière de résoudre un conflit.